Chapitre 4 : Écologie des Communautés
Introduction
L'écologie des communautés est une branche de l'écologie qui étudie les interactions entre différentes espèces coexistant dans un même habitat. Ces interactions peuvent être compétitives, prédatrices, mutualistes ou symbiotiques. L'étude des communautés se concentre sur leur composition, leur structure, leur dynamique et les processus qui influencent leur fonctionnement. Ce chapitre abordera la définition et la structure des communautés, la diversité spécifique, la richesse et l'abondance des espèces, les successions écologiques et les théories sur la stabilité et la résilience des communautés.
1. Définition et Structure des Communautés
1.1 Définition des Communautés
Une communauté écologique, ou biocénose, est un ensemble de populations de différentes espèces qui vivent ensemble dans un même environnement et interagissent entre elles. Ces interactions peuvent être directes ou indirectes et influencent la distribution et l'abondance des espèces dans la communauté.
1.2 Structure des Communautés
La structure d'une communauté inclut plusieurs niveaux d'organisation :
- Stratification verticale : La répartition des organismes en couches verticales, souvent observée dans les forêts (canopée, sous-bois, sol forestier) et les plans d'eau (zones pélagiques, benthiques).
- Stratification horizontale : La répartition spatiale des espèces sur le terrain, influencée par les variations de l'habitat, telles que les gradients de sol, d'humidité et de lumière.
- Répartition temporelle : Les variations saisonnières ou journalières dans la présence et l'activité des espèces, par exemple, les migrations d'oiseaux ou l'activité nocturne et diurne des animaux.
- Réseaux trophiques : Les interactions alimentaires entre les espèces, formant des chaînes et des réseaux trophiques complexes. Cela inclut les producteurs (plantes), les consommateurs primaires (herbivores), les consommateurs secondaires (carnivores) et les décomposeurs (bactéries et champignons).
2. Diversité Spécifique : Indices et Mesures
2.1 Indices de Diversité
La diversité spécifique d'une communauté peut être quantifiée à l'aide de plusieurs indices, qui mesurent à la fois la richesse en espèces et l'abondance relative des espèces présentes.
- Indice de Simpson (D) : Cet indice mesure la probabilité que deux individus choisis au hasard dans une communauté appartiennent à la même espèce. Il est calculé comme suit :
où est la proportion des individus de l'espèce .
- Indice de Shannon-Weaver (H') : Cet indice mesure l'incertitude associée à la prédiction de l'espèce à laquelle appartient un individu choisi au hasard dans la communauté. Il est calculé comme suit :
où est la proportion des individus de l'espèce .
2.2 Mesures de la Diversité
- Richesse spécifique : Le nombre total d'espèces présentes dans une communauté. C'est une mesure simple mais importante de la diversité.
- Abondance relative : La proportion des individus de chaque espèce par rapport au nombre total d'individus dans la communauté. Elle permet de comprendre la dominance et la rareté des espèces.
- Équitabilité : La répartition uniforme des individus entre les espèces. L'indice d'équitabilité de Pielou () est souvent utilisé :
où est l'indice de Shannon-Weaver et est la richesse spécifique.
3. Richesse et Abondance des Espèces
3.1 Richesse des Espèces
La richesse spécifique est influencée par plusieurs facteurs :
- Hétérogénéité de l'habitat : Une plus grande diversité de microhabitats favorise une plus grande variété d'espèces. Par exemple, une forêt avec une structure complexe offre des niches pour plus d'espèces qu'une prairie homogène.
- Ressources disponibles : La quantité et la qualité des ressources alimentaires, de l'eau et des abris influencent la capacité de soutien d'un habitat pour différentes espèces.
- Perturbations : Les perturbations naturelles (incendies, tempêtes) ou anthropiques (déforestation, urbanisation) peuvent créer des opportunités pour de nouvelles espèces de coloniser un habitat ou éliminer des espèces existantes.
3.2 Abondance des Espèces
L'abondance des espèces est déterminée par la densité des populations dans une communauté. Elle est influencée par :
- Taux de reproduction et de survie : Les espèces avec des taux de reproduction élevés peuvent augmenter leur abondance rapidement.
- Compétition interspécifique et intraspécifique : La compétition pour les ressources limite la croissance des populations. Par exemple, deux espèces de plantes qui se disputent la lumière et les nutriments du sol.
- Prédation : Les prédateurs régulent les populations de leurs proies, influençant ainsi l'abondance des espèces.
- Disponibilité des ressources : La quantité de nourriture, d'eau et d'abris disponibles affecte directement l'abondance des espèces.
4. Successions Écologiques : Primaire et Secondaire
4.1 Succession Écologique Primaire
La succession écologique primaire se produit sur des terrains stériles ou nouvellement exposés, comme les coulées de lave, les dunes de sable ou les roches dénudées. Les étapes typiques incluent :
- Colonisation par des espèces pionnières : Les lichens et les mousses sont souvent les premiers à coloniser ces environnements hostiles. Ils peuvent survivre dans des conditions extrêmes et commencer à modifier le substrat pour permettre l'établissement de plantes vasculaires.
- Formation de sols : L'accumulation de matière organique provenant des espèces pionnières, combinée à la dégradation physique et chimique des roches, conduit à la formation de sols.
- Établissement de communautés végétales et animales plus complexes : Au fur et à mesure que le sol s'enrichit en nutriments, les herbes, les arbustes et finalement les arbres peuvent s'installer, suivis par une diversité croissante d'animaux.
4.2 Succession Écologique Secondaire
La succession écologique secondaire se produit dans des zones où une communauté préexistante a été partiellement ou totalement détruite, par exemple, après un incendie, une tempête ou une activité humaine (abandon de terres agricoles). Les étapes incluent :
- Récolonisation par des espèces opportunistes : Les premières espèces à recoloniser sont souvent des plantes herbacées et des arbustes qui se propagent rapidement.
- Reconstitution progressive de la végétation : Les plantes pionnières modifient le sol et créent des conditions favorables pour les espèces suivantes, comme les arbustes et les arbres.
- Stabilisation par des espèces climax : Au fil du temps, la communauté atteint un stade climax où les espèces présentes sont bien adaptées aux conditions environnementales stables et se maintiennent sans changement significatif.
5. Théories sur la Stabilité et la Résilience des Communautés
5.1 Stabilité des Communautés
La stabilité d'une communauté est sa capacité à maintenir sa structure et son fonctionnement malgré les perturbations. Elle peut être analysée sous plusieurs aspects :
- Résistance : La capacité d'une communauté à résister aux perturbations sans subir de changements significatifs.
- Résilience : La capacité d'une communauté à retrouver son état initial après avoir été perturbée.
5.2 Théories de la Stabilité
Hypothèse de la diversité-stabilité : Une plus grande diversité spécifique est censée conduire à une plus grande stabilité des communautés, car une plus grande variété d'espèces peut remplir différentes niches et compenser les perturbations.
Modèle de la redondance : Certaines espèces peuvent compenser la perte d'autres espèces en remplissant des rôles écologiques similaires, ce qui assure la stabilité des fonctions écosystémiques.
Théorie de la mosaïque dynamique : Les perturbations créent une mosaïque de différentes phases de succession au sein d'un écosystème, ce qui contribue à la stabilité globale en permettant une diversité de microhabitats et de niches.
5.3 Résilience des Communautés
La résilience écologique est la capacité d'une communauté à absorber les perturbations et à se réorganiser tout en subissant des changements pour maintenir les mêmes fonctions, structures et feedbacks. Elle dépend de :
Biodiversité : Une plus grande diversité génétique, spécifique et fonctionnelle peut augmenter la résilience en fournissant une variété de réponses aux perturbations.
Interactions entre espèces : Les interactions coopératives, telles que le mutualisme et la facilitation, peuvent renforcer la résilience en créant des réseaux de soutien parmi les espèces.
Flux d'énergie et de nutriments : Des flux stables et efficaces d'énergie et de nutriments à travers les réseaux trophiques contribuent à la résilience en maintenant les processus écosystémiques essentiels.
Conclusion
L'écologie des communautés est une discipline complexe qui nécessite une compréhension approfondie des interactions entre les espèces, de la dynamique des populations et des processus écosystémiques. En étudiant la diversité spécifique, la richesse et l'abondance des espèces, les successions écologiques et les théories de la stabilité et de la résilience, les écologistes peuvent mieux comprendre et gérer les écosystèmes naturels et anthropisés.